Le travail en hauteur
Le travail en hauteur représente une préoccupation majeure en matière de santé et de sécurité au travail codifié aux articles R 4323-58 et suivants. La responsabilité de l’employeur est d’évaluer le risque de chute et de mettre en place les mesures nécessaires pour garantir la sécurité des salariés.
Les chutes de hauteur provoquent chaque année de nombreux accidents du travail plus ou moins graves (coupures, brulures, lumbago, entorse, fracture, traumatisme crânien, décès.). Il s’agit de la seconde cause d’accidents du travail mortels après ceux de la circulation et la troisième cause d’incapacité permanente et d’arrêts de travail. En 2019, 11% des accidents du travail ayant entrainés au moins 4 jours d’arrêt de travail sont dus aux chutes de hauteur. C’est dans le secteur de la construction que l’on constate la plus forte proportion et les conséquences les plus graves.
L’évaluation du risque
En ce qui concerne l’évaluation du risque, des décisions de justice ont souligné l’obligation de l’employeur de procéder à cette évaluation conformément aux principes généraux de prévention énoncés dans le Code du travail, notamment dans les articles L.4121-22 et L.4121-23, en fonction des circonstances spécifiques de chaque situation de travail en hauteur. La Cour d’appel de Caen, dans ses arrêts du 9 février 2023 (n° 21/02078) et du 1 décembre 2022 (n° 21/01897), a illustré cette obligation en soulignant l’importance de l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des salariés travaillant en hauteur.
En outre, les employeurs doivent fournir les équipements de protection individuelle nécessaires et organiser une formation pratique et appropriée à la sécurité pour les salariés temporairement affectés à des postes présentant des risques particuliers, comme le travail en hauteur. A noter que les protections collectives doivent être priorisées par rapport aux protections individuelles.
En 2019, plus de 16 % des chutes entraînant une incapacité permanente dans les accidents du travail sont des chutes depuis des échelles ou des escabeaux… L’utilisation de ces matériels reste encore aujourd’hui la deuxième cause de chutes graves dans le cadre du travail. Ces matériels doivent donc absolument être bannis comme poste de travail au profit de matériels comme les plates-formes individuelles roulantes.
A NOTER
Le Code du travail indique ainsi qu’« il est interdit d’utiliser les échelles, escabeaux et marchepieds comme poste de travail. Toutefois, ces équipements peuvent être utilisés en cas d’impossibilité technique de recourir à un équipement assurant la protection collective des travailleurs ou lorsque l’évaluation du risque a établi que ce risque est faible et qu’il s’agit de travaux de courte durée ne présentant pas un caractère répétitif » (article R. 4323-63) (ex : peintres, plaquistes…)
En tant qu’équipements de travail, les échelles, escabeaux et marchepieds sont soumis à un certain nombre de prescriptions (articles R. 4323-81 à R. 4323-88 du Code du travail). Notamment, leurs matériaux constitutifs et leur assemblage doivent être solides, résistants, en permettant une utilisation adaptée de l’équipement du point de vue ergonomique (article R. 4323-81). Leur stabilité doit pouvoir être assurée et les échelons ou marches doivent pouvoir être placés horizontalement (article R. 4323-82).
Les échelles fixes doivent impérativement être conçues, équipées et installées de manière à prévenir les chutes de hauteur. Des paliers de repos doivent être aménagés en fonction de la hauteur d’ascension (article R. 4323-83).
Il est également important de noter que le comportement des salariés, tel que le non-port du harnais de sécurité, peut jouer un rôle dans l’évaluation de la responsabilité de l’employeur en cas d’accident.
Le rôle du CSE
L’implication du CSE dans les questions relatives au travail en hauteur et à la santé et sécurité au travail est illustrée par plusieurs décisions de justice. La Cour d’appel de Paris, dans son arrêt du 14 mars 2024 (n° 23/10709), a souligné que le CSE doit être informé des risques pour la santé et la sécurité des salariés liés à des projets de restructuration et de licenciement collectif, ainsi que des mesures préventives correspondantes. Cette décision montre l’importance de la transmission d’informations pertinentes au CSE pour lui permettre de rendre un avis éclairé sur les projets affectant les conditions de travail, y compris le travail en hauteur.
Enfin, la Cour d’appel de Paris (n° 22/15482) a rappelé que le document unique d’évaluation des risques professionnels doit être régulièrement mis à jour, notamment lors de décisions d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail. Le CSE a le droit d’être consulté sur ce document, ce qui inclut les évaluations des risques liés au travail en hauteur.
Les mesures de prévention
Le travail en hauteur est associé à un risque significatif de chute, nécessitant une évaluation et une gestion rigoureuses des risques pour assurer la sécurité des travailleurs. La médecine du travail joue un rôle crucial dans cette démarche, notamment en participant à l’évaluation des risques et en recommandant des mesures préventives adaptées :
- Le médecin du travail intervient dans l’évaluation des risques professionnels et est impliqué dans la recommandation de mesures préventives. Par exemple, un diagnostic ergonomique peut être réalisé par le service de santé au travail, identifiant les sources de danger et proposant des mesures de prévention pour les risques identifiés, y compris les risques de chute de hauteur (2ème Chambre Civile, 9 avril 1968).
- L’implication du médecin du travail dans la prévention des risques liés au travail en hauteur est également soulignée dans des cas d’inaptitude de salariés à certains postes à risque, où des recommandations spécifiques sont faites pour éviter l’exposition aux risques de chute (Cour de cassation, Chambre Sociale, 4 juillet 2001, n° 99-44.237).
- La liste des postes à risques, incluant les travaux en hauteur avec risque de chute, doit être établie par l’employeur après avis du médecin du travail et du C.S.E (Cour d’appel de Nîmes, Chambre Sociale, 23 novembre 2021, n° 19/01587).
Ces éléments soulignent l’importance de la collaboration entre les employeurs, les services de médecine du travail et les instances représentatives du personnel pour identifier, évaluer et prévenir efficacement les risques liés au travail en hauteur.
En outre s’agissant du CSE, il peut proposer à l’employeur certaines actions :
- homogénéiser l’adhérence des sols. Le passage d’une surface adhérente à une surface glissante est souvent source de chutes ;
- mettre en place des équipements de protection collective tels que des postes de travail en hauteur possédant des gardes corps conforme (1m10 de hauteur minimum) ou acquisition de plateforme individuelle roulante (escabeau possédant un garde-corps sur la partie haute de travail.) ;
- mettre à disposition d’équipement de protection individuelle comme des chaussures antidérapantes et des «kits antichute » (harnais, longe, ancrages, casques, ces équipements devant être conforme à la norme NF EN 363) ;
- signaler les risques de chute de hauteur ;
- prévoir un éclairage suffisant des situations de travail. L’intensité doit être suffisante (de l’ordre de 200 lux) et sans zones d’ombre ;
- prévoir un contrôle régulier du matériel de travail en hauteur (échelle, escabeaux etc…) ;
- prévoir des formations spécifiques (sur échafaudage, sur ligne électrique, par corde…) formation de base sur le travail en hauteur, formation sur les procédures de sauvetage au port de l’équipement et aux conditions de leur utilisation ainsi qu’aux risques liés au travail en hauteur. effectuer des travaux en hauteur.
INFOJURI CFDT FNCB 12-2024
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